Page:Defoe - Robinson Crusoé, Borel et Varenne, 1836, tome 2.djvu/384

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tion ; à cette ouverture, il leva tout bonnement les épaules, mais quelques jours après il revint avec un des missionnaires pour son trucheman et me fit cette offre : — « Je vous ai acheté, dit-il, une trop grande quantité de marchandises avant d’avoir la pensée ou que la proposition m’ait été faite d’acheter le navire, de sorte qu’il ne me reste pas assez d’argent pour le payer ; mais si vous voulez le confier au même équipage je le louerai pour aller au Japon, d’où je l’enverrai aux îles Philippines avec un nouveau chargement dont je paierai le fret avant son départ du Japon, et à son retour je l’achèterai. » Je prêtai l’oreille à cette proposition, et elle remua si vivement mon humeur aventurière que je conçus aussitôt l’idée de partir moi-même avec lui, puis de faire voile des îles Philippines pour les mers du Sud. Je demandai donc au négociant japonais s’il ne pourrait pas ne nous garder que jusqu’aux Philippines et nous congédier là. Il répondit que non, que la chose était impossible, parce qu’alors il ne pourrait effectuer le retour de sa cargaison, mais qu’il nous congédierait au Japon, à la rentrée du navire. J’y adhérais, toujours disposé à partir ; mais mon partner, plus sage que moi, m’en dissuada en me représentant les dangers auxquels j’allais courir et sur ces mers, et chez les Japonais, qui sont faux, cruels et perfides, et chez les Espagnols des Philippines, plus faux, plus cruels et plus perfides encore.

Mais pour amener à conclusion ce grand changement dans nos affaires, il fallait d’abord consulter le capitaine du navire. Et l’équipage, et savoir s’ils voulaient aller au Japon, et tandis que cela m’occupait, le jeune homme que mon neveu m’avait laissé pour compagnon de voyage vint à moi et me dit qu’il croyait l’expédition proposée fort belle, qu’elle promettait de grands avantages et qu’il serait ravi