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96 UN MAÎTRE *. AUGUSTE COMTE

moyen âge. La féodalité réalise la plus solide cohé- sion et l'Église l'union la plus heureuse que l'huma- nité ait connues jusqu'ici. Néanmoins, et bien que saint Thomas d'Aquin renoue la pensée catholique à la pensée païenne d'Aristote, il y manque l'unifica- tion dans le temps et dans l'espace que l'absolu théologique ne saurait atteindre.

Déjà, dans les controverses scolastiques, tous nos conflits d'idées surgissent. Du réalisme de Duns Scot naîtra la métaphysique dissolvante, et du no- minalisme de. Roscelin et Abélard, le positivisme reconstructif.

Puis, les légistes, la Réforme, le Parlement, la courtisanerie, l'absolutisme temporel, saperont l'harmonieux édifice des institutions féodales. En- fin, la critique négative des encyclopédistes et l'ef- fervescence révolutionnaire de la bourgeoisie am- bitieuse provoqueront directement la Grande Crise.

Étape nécessaire peut-être, si les principes fonda- mentaux de l'ancien régime étaient vraiment altérés ou épuisés. Mais il ne fallait pas s'y attarder.

En passant à l'état chronique, l'anarchie devient incurable et mortelle. Dès 1842, A. Comte annonçait « le désastreux essor des grandes luttes intestines, inhérentes à notre anarchie mentale et morale, entre ouvriers et patrons, entre villes et campagnes ». Et ce furent, en effet, février et juin 1848, la guerre de 1870-71, la Commune et enfin la conflagration mondiale. Maintenant, dans la paix précaire qui n'est qu'une lassitude de s'entretuer en masses, nous entrons dans l'ère du Grand Chaos.

Écroulement tragique ! Ce n'est pas seulement le passant qui s'effare et ne sait plus sur quel sol con-