Page:Deherme - Aux jeunes gens.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

8 UN MAÎTRE : AUGUSTE COMTE

l'élaboration d'une œuvre où il fallait avoir présente à L'esprit une immensité de faits de l'ordre scienti- fique et historique. La force de mémoire était, chez lui, le puissant auxiliaire de la force de concep- tion. »

Dans son livre la Mémoire et Voubli, M. L. Dugas fait judicieusement observer que cette dernière pro- position pourrait se retourner ainsi : « La force de « conception était, chez Auguste Comte, le puissant « auxiliaire, ou, plutôt, le principe de la force de mé- « moire». Si, chez lui, la mémoire servait la pensée, c'est la pensée, c'est-à-dire la théorie et le raisonne- ment, qui guidait d'abord, puis évoquait ensuite la mémoire. Autrement dit, c'est à force de composer, de classer et d'ordonner ses souvenirs qu'Auguste Comte s'en rendait maître, les avait toujours prêts et en quelque sorte sous la main. Est-ce donc ici le triomphe de la mémoire ou celui de la pensée systé- matique? C'est., évidemment, le triomphe de celle-ci; mais aidée par celle-là. »

Dans cette première partie de sa vie, où il doit concentrer toutes ses forces cérébrales, il ne saurait dompter sa sensibilité qu'en la refoulant. Car il est déjà Comte tout entier. S'il a pu se proposer d'être le plus grand par le cerveau, c'est qu'il l'est virtuel- lement par le cœur. Ce tourmenté de Lamennais pouvait en dire, ce qu'il eût appliqué plus exacte- ment à soi-même, car Auguste Comte, lui, savait où aller : « C'est une belle âme qui ne sait où se prendre », et en janvier 1826, dans le Mémorial ca- tholique: c'est « un esprit bien supérieur aux pré- jugés qui dominent le vulgaire des philosophes ».

Adolescent, il avait écrit à son ami Valat : « L'étude