Page:Deherme - La Crise Sociale.djvu/19

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Nous participons tous au désordre de quelque manière, soit intellectuellement, soit sentimentalement, soit pratiquement. Et il ne nous est pas toujours loisible de nous y refuser. Nous sommes entraînés par le courant. Il faut une grande force interne, la foi ou le caractère, rien que pour ne pas aller tout à fait à la dérive dans le tohu-bohu de l’épouvantable débâcle morale et mentale dont mourra peut-être la civilisation occidentale.

Cette force, il la faut plus grande encore pour entreprendre d’agir socialement.

Un régime électoral que l’imbécillité métaphysique seule a pu concevoir, l’ignorance préparer, l’inconscience réaliser, et que la trahison seule peut maintenir, un régime, qui vit de corruptions et de lâchetés, a mis toutes les puissances à la disposition de l’anarchie dispersive. Et d’abord celle — redoutable entre toutes pour les rhéteurs que sont devenus les Français — des mots.

Ainsi, ceux qui vont à toutes les régressions bestiales sont les « avancés », ceux qui détruisent tout ce que l’humanité a péniblement édifié sont des « réformistes », et les pires ennemis de toute socialité sont des « socialistes ». Il n’y a que les « anarchistes » pour proclamer ce qu’ils sont et, peut-être, parce qu’ils le sont moins que les autres.

Comment faire entendre à une masse abêtie par ses instituteurs, ceux de l’école, ceux de la presse, ceux de la réunion et ceux des Parlements, que s’agiter n’est pas toujours avancer ; changer, acquérir ; par contre, que préserver le patrimoine commun