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Page:Deherme - Le Pouvoir social des femmes.djvu/41

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vicieuse de ne se fixer à rien. Comme les fumeurs d’opium, ils prennent leurs bavardages et leurs rêvasseries pour de l’action, de la pensée et de l’amour.

« D’un côté, dit A. Comte, la destination de chacun dans la société n’étant plus déterminée par aucunes maximes généralement respectées, et les institutions pratiques ayant dû se conformer à cette situation des esprits, l’essor des ambitions particulières n’est plus contenu réellement que par la puissance irrégulière et fortuite des circonstances extérieures propres aux divers individus. D’un autre côté, le sentiment social cherchant vainement, soit dans la raison privée, soit dans les préjugés publics, des notions exactes et fixes sur ce qui constitue le bien général dans chaque cas qui se présente, il finit par dégénérer peu à peu en une vague intention philanthropique, incapable d’exercer aucune action réelle sur la conduite de la vie. Par cette double influence, chacun, dans les grands rapports sociaux, est graduellement conduit à se faire centre, et la notion de l’intérêt particulier restant seule bien claire au milieu de tout ce chaos moral, l’égoïsme pur devient naturellement le seul mobile assez énergique pour diriger l’existence active. »

Même si l’on est un lettré intelligent, un citoyen sincère et généreux, un homme de bonne volonté, on ne projette encore que l’âme sociale actuelle dans ce qu’elle a de meilleur. Or, si on la peut parer, cette âme, on ne saurait la transformer dans son fonds. Elle n’est que tout ce qu’elle peut être, à travers le philosophe de Sorbonne, le politicien, le journaliste, le paysan ou l’ouvrier socialiste des faubourgs. Ce qui apparaît le plus nettement, c’est que cette âme ne sait où s’ap-