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à la raillerie, multipliait les épigrammes sur le genre d’amitié qui s’était établi entre dona Olimpia et Pamphile ; aussi lorsque cette lettre fut divulguée par l’indiscrétion de quelque serviteur, ne manqua-t-on pas de répéter tout haut et d’écrire sur les murs de la ville que dona olimpia donnait ses instructions aux nonces du pape. Mais loin de s’offenser de ces railleries, cette femme, douée du courage patient de toutes les âmes ambitieuses, se félicitait intérieurement de voir la populace s’habituer en riant à son pouvoir qui s’affermissait. À ces plaisanteries, assaisonnées d’injures souvent grossières, elle opposait le luxe calculé des aumônes faites au couvent, des distributions d’habits et de secours aux pauvres, tandis que dans sa maison tout était soumis aux règles d’une opulente économie.

» En l’absence de Pamphile, lorsqu’il séjourna pendant plusieurs années en France et en Espagne, avec la charge de dataire près du cardinal F. Barberin, attentive à tout ce qui se passait à Rome, elle employait une grande partie de son temps à écrire avec régularité à son beau-frère tout ce qui pouvait contrarier ou servir leurs projets d’ambition. Parfois, dérogeant à son économie habituelle, le palais de Pamphile, qu’elle habitait avec toute sa famille, brillait d’un luxe inusité, pour recevoir tout ce que Rome renfermait de personnes d’importance. Les cardinaux, les prélats, les ambassadeurs, la noblesse romaine, s’accoutumaient déjà à fréquenter amicalement le palais d’une femme où ils devaient bientôt ne plus être admis que comme chez une souveraine. Là tout, depuis la somptuosité des appartements jusqu’aux discours qui s’y tenaient, était grave et mystérieux. Quelques jeunes femmes, entre autres les filles de dona Olimpia, rendues muettes par sa présence, demeuraient immobiles sous l’éclat éblouissant de leurs parures. La maîtresse, que dis-je ? la reine du logis avait seule droit de parler, et ce n’était que tour à tour, et quand les assistants étaient invités par un sourire, qu’ils venaient présenter leurs hommages à Olimpia, ou lui parler à voix basse si elle les interrogeait.

» Mais à peine le dernier étranger était-il hors du palais, que, faisant prendre à chaque personne de sa famille le che-