Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment, ne put-il contenir la vive satisfaction que l’on éprouva à revoir une personne qui était si généralement aimée. À mesure qu’elle avançait, la foule allait toujours croissant, à tel point même que les deux files de carrosses ayant été forcées de s’arrêter, les personnes qui étaient en voiture se levèrent ou se mirent aux portières en agitant leurs mouchoirs, firent retentir l’air de vivat ! tandis que la princesse de Rossano, envoyant des saluts de remercîment et d’amitié à droite et à gauche, agitait elle-même une écharpe, et donnait à son entrée dans Rome toute l’apparence d’un triomphe.

Elle remonta ainsi la rue du Cours jusqu’au palais de Venise. Là de nouveaux flots de curieux, amoncelés pour la voir, donnèrent des témoignages de leur enthousiasme avec d’autant plus de vivacité que leur impatience avait été plus longtemps contenue. Sur ce point se trouvait en particulier une immense quantité de gens du peuple, dont les acclamations bruyantes étaient mêlées de vivat pour la princesse, et de reproches énergiques destinés à la belle-sœur du pape. La plupart d’entre eux, après avoir salué de leurs louanges madame de Rossano, criaient avec fureur : « À bas dona Olimpia, qui nous fait mourir de faim ! à bas l’infâme ! à mort la louve ! »

Rien de ce qui composait cette joie sauvage n’échappa à l’attention de la princesse, qui, fatiguée cependant d’une scène si bruyante et si longue, ordonna à son cocher de partir au galop. Les valets à cheval précédant la voiture se firent jours à grands coups de fouet à travers une nuée de polissons et de faquins, et bientôt toute la cavalcade, s’élançant dans les rues adjacentes, ne tarda pas d’arriver au palais Farnèse, où la princesse était attendue.

Pour une jeune femme enceinte de huit mois c’était une journée laborieuse que celle que venait de passer Cornélia ; toutefois elle voulut la terminer eu achevant le coup de tête qui lui avait déjà si bien réussi. Elle écrivit d’abord une lettre à dom Pamphile, pour lui donner des nouvelles de sa santé et le mettre au courant de tout ce qui s’était passé à Rome, en lui signifiant qu’elle ne prétendait plus sortir de cette ville, et