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Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/21

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ples, qui ne donnassent lieu à des suppressions et à des mutilations de cette espèce.

Puisque l’on a fait des études comparatives sur la poésie biblique et les ouvrages des plus fameux lyriques profanes, je ne pense pas qu’il soit inconvenant de rapprocher littérairement certains récits contenus dans les livres saints des récits mondains sous forme de romans ou de nouvelles. Je tiens d’autant plus à ce rapprochement qu’il me fournira les moyens de démontrer qu’avec les intentions les plus pures, il est impossible de tracer un tableau fidèle de la vie et des passions humaines, sans y introduire des détails qui prêtent aux allusions malignes, qui blessent l’honnêteté ou font frémir d’horreur.

Passons sur les monstrueuses aventures des deux Thamar, et ne faisons que signaler celle non moins effroyable du lévite d’Éphraïm, si remarquable cependant par la simplicité de son début et par la grande catastrophe qui la termine ; puis je dirigerai plus particulièrement l’attention sur l’histoire de Joseph, le plus beau, le plus touchant récit qui existe peut-être. Je rappellerai encore le drame imposant de Judith, les curieuses et intéressantes aventures de la belle Esther, le poëme si original de Job, où le désespoir et le découragement humain contrastent si vigoureusement avec la puissance du Créateur, et enfin deux pastorales délicieuses l’une simple, touchante, c’est l’histoire de Ruth ; l’autre brillante comme le soleil levant : le Cantique des cantiques.

Je me borne à rappeler les titres de ces récits gravés dans toutes les mémoires, et si je ne fais pas ressortir minutieusement les passages qui offensent la pudeur, les traits de naïveté qui prêtent à rire, certaines actions infâmes et des tableaux trop voluptueux répandus dans ces narrations bibliques, c’est, comme je l’ai dit tant de fois, parce que l’expérience démontre qu’un ouvrage peut comprendre des détails très-offensants sans qu’il cesse pour cela d’être pur dans son ensemble et d’exercer une influence morale très-puissante.

Sans m’occuper des sujets ni m’appesantir sur le mérite et la nature des détails, j’ai toujours divisé les livres en deux grandes catégories : les uns qui donnent de l’énergie à l’âme, ce sont les bons ; les autres qui la détrempent et l’af-