gner au pape à quel point la famille se sentait blessée. Les deux petites princesses Justiniani et Ludovisi, à qui leur mère laissait si rarement la liberté de manifester ce qu’elles éprouvaient, saisirent cette occasion de se dédommager de leur silence habituel, en criant bien haut que la conduite du pape était affreuse, et qu’elles ne consentiraient jamais à demeurer dans le palais occupé par un neveu postiche qui venait empiéter sur leurs droits.
Dona Olimpia, pendant le jour de la promotion, les laissa dire et crier tant qu’ils voulurent ; mais le lendemain, et lorsque par les soins de son dévoué Azzolini elle eut appris la disposition où toutes les personnes d’importance étaient de venir la voir et la complimenter dans son malheur, jugeant alors que sa puissance personnelle était demeurée à peu près intacte, loin de vouloir fuir elle sentit au contraire combien il était prudent de demeurer à Rome, et de s’y retrancher au milieu du rempart de sa famille, qui était aussi celle du pape. Tournant donc à l’avantage de ce projet toutes les raisons que ses enfants et ses neveux faisaient valoir en faveur d’une retraite, elle leur démontra bientôt le péril qu’il y aurait à courir en s’éloignant de la présence du pontife. Elle signifia donc la résolution qu’elle avait prise de ne quitter ni Rome ni même le palais Pamphile, et ordonna à tous les siens de suivre son exemple.
Cette question résolue, il s’en présenta aussitôt une autre. Les parents de dona Olimpia iraient-ils féliciter le nouveau cardinal, ou attendraient-ils que la jeune éminence vînt se présenter chez eux ? À la suite d’une longue délibération tenue en conseil de famille, celle qui le présidait naturellement décida que les hommes, dom Pamphile ainsi que les princes Justiniani et Ludovisi, feindraient une maladie pour se dispenser de cette visite, et que les femmes profiteraient de l’usage de se mettre dans un lit de parade pour recevoir ainsi et sans étiquette le nouveau cardinal neveu.
Toutes ces petites scènes furent préparées et sues d’avance de part et d’autre ; aussi le pape engagea-t-il son nouveau favori à ne pas se formaliser de toutes ces bagatelles, en lui conseillant, ce sont ses paroles, « de donner un peu de fumée