à toute la famille, et de conserver le rôt pour lui. » Le cardinal obéit, et prévint par ses visites tous les princes, excepté Justiniani, qui, se souciant fort peu des susceptibilités de ses parents, s’était empressé, le jour même de l’élévation d’Astalli, d’aller le trouver chez lui et de le féliciter en l’appelant son cousin !
Le jeune cardinal neveu, on l’a déjà dit, était fort bel homme, et possédait toutes les grâces de la politesse. Il alla voir les princes, ses nouveaux parents, les assura de sa bienveillance à leur égard, leur répétant, sous les formes les plus variées et les plus séduisantes, la même idée : celle de se trouver toujours prêt à leur être agréable, utile ; de ne prétendre qu’à se charger du poids et de la responsabilité des affaires pour leur laisser l’agrément, le profit et l’honneur ; qu’en un mot il n’avait d’autre but que de servir fidèlement le pape, et de se rendre utile à toute la famille de sa sainteté.
Le cardinal neveu était si jeune et se sentait si heureux de son inconcevable fortune, qu’il mit une franchise d’autant plus grande en parlant ainsi, qu’il était naturellement bon par caractère, et que ses talents ne lui permettaient pas d’espérer d’obtenir plus qu’il avait. Aussi ses visites produisirent-elles un effet magique sur toute la famille, naguère encore si prévenue contre lui. Je ne parle pas de Justiniani, qui s’était jeté dans ses bras ; mais quant au prince Ludovisi, si opposé à son élévation ; quant aux deux filles de dona Olimpia et au cardinal Maldachini, ils étaient restés charmés des manières et de la personne du nouveau cardinal.
Don Camille lui-même et la princesse de Rossano, malgré leurs préventions défavorables, furent presque aussitôt vaincus par l’air franc et ouvert et par les grâces extérieures du cardinal, lorsqu’il vint les voir. La princesse surtout le reçut avec beaucoup de cordialité. De son lit, où elle se tenait encore à la suite de sa couche, elle lui témoigna à plusieurs reprises le désir très-vif qu’elle avait de vivre en bonne intelligence avec lui ; et lorsqu’il fut sorti, sur ce que Camille témoignait encore quelques appréhensions sur les suites de l’introduction forcée de ce jeune homme dans leur famille,