aux fruits et aux légumes, en ayant soin de ne faire payer aux marchands qui y viendront que le tiers du droit qu’Innocent exigeait d’eux, et je serais bien trompé si ce préambule ne calmait déjà beaucoup les esprits. Mais il faut faire plus encore, et combiner une mesure de prudence indispensable avec un acte de sévérité apparente qui vous laissera tout le temps de réfléchir sur la conduite que vous aurez à tenir ensuite. Il ne faut pas se dissimuler que la haine de la populace de Rome envers dona Olimpia est poussée à un excès incroyable, et qu’il ne se passe guère de semaine sans que sa vie ne courre des dangers très-grands. Exilez-la, envoyez-la à la forteresse d’Orvietto, ou bien que l’on dise seulement qu’elle y est, et qu’on la consigne chez elle à Viterbe pendant l’instruction du procès. Vous connaissez la mobilité des Romains : quand dona Olimpia ne sera plus dans leur ville ils s’en occuperont beaucoup moins. Son fils dom Camille et la princesse de Rossano, qui sont aimés du peuple, viendront s’établir au palais Pamphile. Ils veilleront au déblayement de la place, à l’achèvement de l’église. Leur présence dans ce lieu en éloignera les rassemblements tumultueux qui s’y forment habituellement ; et enfin, votre sainteté, s’étant assurée de la personne de l’accusée et faisant instruire son procès, on sera bien forcé d’attendre patiemment.
L’opinion d’Azzolini parut si sage au pape, qu’il envoya presque aussitôt à dona Olimpia l’ordre de sortir de Rome sous deux jours. Dom Camille, qui n’était pas dans les secrets de cet exil, craignant, ainsi que toute sa famille, que cette peine n’entraînât immédiatement le séquestre de leurs biens, courut chez le pape pour lui demander audience. Mais Azzolini, qui était en ce moment avec le pontife, fut chargé de dire au prince « que sa sainteté avait résolu de ne voir personne de la maison de madame sa mère avant qu’elle ne fût sortie de Rome, conformément à l’ordre qui lui en avait été donné. » Quelques mots d’amitié que le cardinal ajouta à cette réponse officielle calmèrent les inquiétudes du prince et le décidèrent à engager sa mère à partir.
Pour éviter les injures et les violences que le peuple, in-