core à l’écart, en attendant que ses laquais vinssent avertir que l’équipage était en état.
Les choses en étaient là, lorsqu’il se préparait une autre scène dans l’une des encoignures de la sacristie. Il y régnait un peu de désordre, suite inévitable d’une cérémonie comme celle qui venait d’avoir lieu. On pliait, on resserrait les habits ; le bedeau rassemblait soigneusement les cierges, et les enfants de chœur, employés à ces soins divers, allaient et venaient en tournant rapidement autour des jeunes communiantes rangées en cercle au milieu de la sacristie. Dans un angle, étaient blottis deux de ces petits vauriens qui, en quittant leur aube et leur calotte rouge, avaient repris tout aussitôt leurs habitudes de polissons de village. Ils se disputaient en silence, quoique avec fureur et acharnement, un long morceau de cire, qui avait coulé d’un cierge. Leur proie étant tombée à terre, ils se colletaient dans l’ombre, chacun voulant maintenir son antagoniste pour se baisser le premier et la saisir.
La grande croix d’argent était précisément placée dans cet angle, et pendant les efforts des deux combattants, l’un d’eux, en serrant le pied contre le mur, ôta l’équilibre à la croix et la fit tomber au milieu de la sacristie.
À l’instant même, des cris affreux se firent entendre, et toutes les robes blanches des jeunes filles furent inondées du sang qui jaillit de la tête de mademoiselle de Soulanges. La croix était tombée sur elle.
Au milieu du tumulte et de l’effroi que causa cet horrible accident, on ne distinguait que ces mots que répétait madame de Soulanges hors d’elle-même :
— Ma fille est morte ! ma fille est morte !
M. de Lébis, le curé et les jeunes communiantes entouraient Louise et cherchaient à s’assurer si elle était encore vivante, lorsque son père, qui entrait pour venir lui donner le bras, la trouva étendue sur la terre et couverte de sang.
Malgré sa profonde émotion, le curé rentra en toute hâte dans l’église, d’où heureusement il ramena le médecin du pays, qu’il avait remarqué par hasard en faisant le trajet de l’autel à la sacristie.