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fant ! va, ne t’offense plus de ce nom qui t’est donné pour la dernière fois par celle que tu as d’abord aimée comme une mère. Console-toi, Ernest, prends courage ; ah ! je sacrifierai tout pour t’en donner.

Justine se leva, laissant Ernest dans un étonnement facile à concevoir ; puis elle se plaça devant son bureau et écrivit un billet ; dès qu’elle l’eut achevé, elle le présenta à son cousin pour qu’il le lût, ce qu’il fit.

— Maintenant vous me promettez, Ernest, ajouta mademoiselle de Liron en reprenant la lettre, sur laquelle elle mit : À mon père ; vous me promettez que, dès que vous serez à Paris, vous emploierez toute votre ardeur et toutes vos facultés non-seulement à vous faire une position dans le monde, mais encore à donner de l’éclat à vos talents et à votre nom ?

— Je vous le promets.

— Ce n’est pas tout.

— Que voulez-vous encore ? dites, parlez.

— Mais non... plus tard, Ernest, plus tard, mon ami, je te le dirai. Va, pour l’instant, sois satisfait. Demain, quand tu seras sur la route de Paris, cette lettre que je viens d’écrire sera remise à mon père ; je te le promets sur l’honneur, je te le jure. Ainsi, tu ne peux plus douter de l’amour que j’ai pour toi.

— Ah ! ma chère Justine, balbutia Ernest au milieu des soupirs et des larmes de joie qui le suffoquaient, ma vie entière ne suffira jamais à reconnaître ta tendresse et ta bonté !

De ce moment, l’émotion des deux amants fut portée à son comble ; ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre, et leurs lèvres se confondirent dans un long baiser. Minuit sonnait à la paroisse.

Être aimé franchement et se sentir combler de bonheur volontairement par celle que l’on aime, est une félicité bien rare ! Ernest l’éprouva.

Vers les deux heures et demie du matin, dans leur alcôve et sur leur lit, les deux amants devisaient tendrement ensemble. S’interrogeant sur les premiers temps de leurs amours, ils s’avouaient alors joyeusement, ce qu’ils avaient