diesse extraordinaire ; les difficultés étaient toujours un attrait de plus pour lui. On s’explique alors comment il conçut la plus violente passion pour Syligaitha sa sœur. C’était peu pour lui que les relations politiques qu’il avait avec elle lui donnassent l’apparence de son ennemi, il ne tint pas plus compte de cet obstacle que du souvenir de son père Frédéric, et des droits de son beau-frère Renaud, auxquels il voulait attenter. Mettant donc toutes ces considérations de côté, il médita son projet criminel, et se prépara, au mépris des lois divines et humaines, à satisfaire la passion que lui inspirait Syligaitha.
» Cette princesse, dit la vieille chronique napolitaine, était jeune, belle et d’une taille avantageuse. Elle avait le teint éclatant, le regard vif ; ses cheveux blonds et bouclés descendaient le long de son front vraiment royal, et il y avait dans toute l’habitude de sa personne un certain je ne sais quoi qui lui soumettait tous ceux qui la voyaient. À ces dons, elle en joignait d’autres non moins précieux encore : car, instruite et savante même, elle parlait avec grâce et esprit.
» Mainfroi avait souvent éprouvé le pouvoir de ces charmes. Cette beauté, cette grâce, ce laisser-aller féminin qui s’était déployé si souvent sans crainte en présence d’un frère, excitaient encore la violence de son amour. Parfois cependant le souvenir de l’honneur de sa famille, de la sainteté des droits de son beau-frère, et par-dessus tout ce doux nom de sœur, l’arrêtaient dans l’exécution de son funeste dessein. Ce conflit de sentiments, ce combat intérieur de ses désirs et de ses devoirs, lui causèrent des tourments si continuels, qu’il ne put bientôt plus prendre ni nourriture ni sommeil. La raison devint muette, et l’amour triompha. Profitant donc d’une absence passagère de Renaud, il alla se présenter à Syligaitha, et non sans éprouver quelque honte et tant soit peu d’embarras, il lui ouvrit son cœur. Il lui fit entendre que, cédant à un amour qu’il ne pouvait plus vaincre, il la priait de lui pardonner sa démarche, mais que, certainement, il mourrait si elle ne l’écoutait pas. Au même moment où il prononçait ces mots, des larmes abondantes jaillirent de ses