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yeux enflammés, il perdit l’usage de sa raison, et prodigua confusément les prières et les menaces, comme un homme déterminé à commettre quelque violence. D’abord Syligaitha fut comme pétrifiée ; mais bientôt la fureur insensée d’un homme qu’elle connaissait pour ne rien respecter de ce qui s’opposait à ses désirs lui rendit le sentiment de la crainte. Pâle et tremblante, elle pensa avec effroi au crime de son frère, à l’absence de son époux, et ce ne fut pas sans frémir que ses yeux rencontrèrent le lit conjugal près duquel elle était. La présence du criminel Mainfroi lui fit horreur, et il n’y a pas de supplice qu’elle n’eut bravé pour s’y soustraire.

» Pendant cette cruelle alternative, et tandis que Manfroi continuait d’exhaler ses offensantes prières, Syligaitha reprit quelque empire sur elle-même et maîtrisa sa peur. Elle fit quelques efforts pour calmer la passion désordonnée de son frère, en cherchant par ses paroles à adoucir les maux qu’il ressentait. Mais la blessure était trop profonde, et le mal avait circulé si longtemps dans les veines de Mainfroi, qu’il n’y avait plus moyen d’agir sur son esprit aigri par la souffrance. Ce n’étaient plus des conseils que demandait Mainfroi, mais un prompt remède.

» Syligaitha sentit bien que, si elle tardait à répondre, l’occasion et la violence serviraient les terribles desseins de son frère ; aussi, sans attendre le retour d’un nouvel accès de sa part et dans l’idée de sauver l’honneur de sa race, elle promit au prince criminel de se rendre bientôt à ses vœux, sous la condition seulement qu’il se retirerait à l’instant de chez elle pour se rendre deux jours après à son palais hors des murs de Caserte, où l’absence de la cour leur laisserait plus de liberté. La promesse fit accepter la condition, et Mainfroi, triomphant dans l’idée de son crime, mesura avec impatience les heures et les instants qui en retardaient l’exécution.

» Enfin le jour désigné arriva. Mainfroi se présente chez Syligaitha, qui avait tout fait préparer pour recevoir son frère avec magnificence. L’heure du rendez-vous avait été fixée au soir, en sorte que la princesse avait eu soin de commander un souper somptueux, dont tous les mets, cepen-