Page:Delacroix - Journal, t. 1, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/197

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.


Vendredi 28 mai. — J’ai passé toute la soirée avec Dufresne, qui part pour la campagne. J’ai la tête si remplie de choses à cette occasion que je n’en peux retrouver aucune.

— Je reprends depuis quelques jours avec entrain mon tableau. J’ai travaillé aujourd’hui à l’ajustement de la femme morte.

— Rien de bien remarquable ces derniers jours : vu Dimier mardi, il partait le lendemain.

— Qu’au moins tu admires les grandes vertus, si tu n’es pas assez ferme pour être toi-même vraiment vertueux ! Dufresne dit qu’il est capable de dévouement pour toutes les grandes choses, etc…, mais qu’il en voit le vide, que ce n’est rien au fond. J’éprouve le contraire… J’y rends hommage, mais je suis trop faible pour les faire. Mon affaire est tout autre.

Samedi 29. — Travaillé à la draperie de la vieille femme.

— Le soir, rejoint Félix et Pierret au Palais-Royal. Vu Mme X***. Désirs.

Lundi 31. — Ce soir au Barbier à l’Odéon ; c’est fort satisfaisant. J’étais près d’un vieux monsieur qui a vu Grétry, Voltaire, Diderot, Rousseau, etc. Il a vu Voltaire dans un certain salon, disant aux femmes des galanteries comme on les lui connaît. « Je vois en vous, disait-il en s’en allant, un siècle qui commence ; en moi, c’en est un qui finit : c’est le siècle