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VIII
EUGÈNE DELACROIX.

aussitôt après avoir quitté le ministère des Affaires étrangères, fut envoyé en Hollande pour y représenter la France, enfin et surtout une prétendue ressemblance entre le peintre et le prince de Talleyrand, autant de causes qui, se surajoutant, se soudant les unes aux autres, amenèrent certains esprits à cette conviction intime qu’Eugène Delacroix était le fils naturel du grand diplomate : c’est ainsi que s’établissent la plupart des légendes, résultats d’ingénieuses hypothèses, qui, envisagées isolément, ne reposent sur aucune base solide, et dont le groupement seul fait la force ; pourtant, à le bien prendre, elles ne peuvent avoir pour un esprit sérieux d’autre valeur que leur valeur individuelle, et c’est en les examinant séparément qu’il convient de les juger. Or il est une chose sûre, c’est que pas un de ces arguments n’offre un caractère de créance suffisant pour qu’on en tire une preuve. Sans aller aussi loin que M. Maxime du Camp, qui repousse avec indignation cette idée d’une filiation illégitime, et, se posant en véritable champion de l’honneur de la famille, présente encore moins d’autorité dans ses négations que les partisans de la descendance naturelle dans leurs ingénieuses allégations, sans dire comme lui « que rien dans ses habitudes d’esprit, dans sa vie parcimonieuse, dans sa sauvagerie, dans ses aspirations qui souvent répondaient mal à ses aptitudes, rien, ni dans l’homme intérieur, ni dans l’homme extérieur, ne rappelait le prince de Talleyrand », nous pensons qu’en dépit même des ressemblances, il n’y a là qu’une simple conjecture à laquelle on ne doit pas attacher plus d’importance qu’à une hypothèse non vérifiée.

Les dispositions artistiques de Delacroix se manifes-