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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

doit-elle pas logiquement arriver sur le mur ou sur la tapisserie sur laquelle elle se détache ?… A moins de supposer que la figure se détache fortuitement sur une draperie extrêmement foncée, — mais cette condition est fort rare, — ou sur l’entrée d’une caverne ou d’une cave entièrement privée de jour, circonstance encore plus rare, le moyen ne peut paraître que factice.

Ce qui fait le charme principal des portraits, c’est la simplicité. Je ne mets pas au nombre des portraits ceux où on cherche à idéaliser les traits d’un homme célèbre qu’on n’aura pas vu et d’après des images transmises ; l’invention a droit de se mêler à de semblables représentations. Les vrais portraits sont ceux qu’on fait d’après des contemporains : on aime à les voir sur la toile, comme nous les rencontrons autour de nous, quand même ce seraient des personnes illustres. C’est même à l’égard de ces dernières que la vérité complète d’un portrait vous offre plus d’attrait. Notre esprit, quand ils sont loin de notre vue, se plaît à agrandir leur image comme les qualités qui les distinguent ; quand cette image est fixée et qu’elle est sous nos yeux, nous trouvons un charme infini à comparer la réalité à ce que nous nous sommes figuré.

Nous aimons à trouver l’homme à côté ou à la place du héros. L’exagération du fond dans le sens de l’obscurité fait bien ressortir, si l’on veut, un visage très éclairé ; mais cette grande lumière de-