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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/260

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

de demander à un Rubens l’espèce d’intérêt qu’un Léonard ou un Raphaël sait exciter par des détails tels que des mains, des têtes dans lesquelles la correction s’unit à l’expression. Il est aussi inutile de demander à ces derniers ces effets d’ensemble, cette verve, cette largesse que recommandent les ouvrages du plus brillant des peintres. Le Tobie de Rembrandt ne se recommande pas par les mêmes qualités que tels tableaux du Titien, dans lesquels la perfection des détails est loin de nuire à la beauté de l’ensemble, mais qui ne portent point dans l’imagination cette émotion, ce trouble même que la naïveté et le nerf des caractères, la singularité et la profondeur de certains effets font éprouver à l'âme en présence d’un ouvrage de Rembrandt.

David faisait consister le mérite à bien copier son modèle, tout en s’amendant à l’aide de fragments antiques pour en relever la vulgarité.

Corrège, au contraire, ne jetait un regard sur la nature que pour s’empêcher de tomber dans des énormités. Tout son charme, tout ce qui est en lui puissance et effets de génie, sortait de son imagination pour aller réveiller un écho dans les imaginations faites pour le comprendre…

Éclectisme dans les arts. Ce mot pédant, introduit dans la langue par les philosophes de ce siècle, s’applique assez bien aux tentatives modérées de certaines écoles. On pourrait dire que l’éclectisme est la bannière française par excellence dans les arts du dessin et