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Page:Delacroix - Journal, t. 3, éd. Flat et Piot, 3e éd.djvu/381

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

de plus instructif que leurs erreurs elles-mêmes ? Car l’admiration qu’inspirent ces hommes privilégiés et venus les premiers ne doit pas être une admiration aveugle ; les adorer dans toutes leurs parties serait, particulièrement pour de jeunes aspirants, ce qu’il y aurait de plus dangereux ; la plupart des artistes, même parmi ceux qui sont capables d’une certaine perfection, sont enclins à s’appuyer sur les faiblesses des grands hommes et à s’en autoriser. Ces parties qui, chez les hommes privilégiés, sont généralement des exagérations de leur sentiment particulier, deviennent facilement, chez de faibles imitateurs, de grossières bévues ; des écoles entières ont été fondées sur des côtés mal interprétés des maîtres, et de déplorables erreurs ont été la suite de ce zèle inconsidéré à s’inspirer des mauvais côtés des hommes remarquables, ou plutôt de l’impuissance de reproduire quelque chose de leurs sublimes parties.

18 janvier. — Malheureusement, chaque homme ne peut suffire qu'à une tâche restreinte ; peut-être que beaucoup d’hommes capables d'écrire d’excellentes choses sur la peinture ou sur les arts en général (je parle toujours, non de simples critiques, mais d’hommes du métier en état de répandre une véritable instruction) ont été retenus par l’idée de l’insuffisance d’un seul homme, occupé d’ailleurs de l’exercice même de sa profession, à faire un ouvrage sur ces matières si peu approfondies.