Page:Delair - L’Éloge d’Alexandre Dumas, 1872.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Partant, avec ses dents longues, sur son cheval
Jaune, en piteux harnois, du colombier natal,
Muni d’un bref scellé pour quelques vieux illustres,
Et qui gagne, à travers les quolibets des rustres,
La grand’ville du roi Henri Quatre, et la cour
De France, paradis des duels et de l’amour ?
Qui ne l’a lu, ce conte, et n’en pourrait redire
Quelque bonne aventure ; et qui peut sans sourire
Se rappeler ces coups hardis, ces dévoûments,
Ces peuples suspendus aux querelles d’amants,
Ces démons, d’un baiser versant un philtre étrange,
Ces reines que l’on sauve et ces rois morts qu’on venge.
Ces feutres, ces velours, ces buffles, ces satins, —
Ces intrépides cœurs défaisant les destins,
Chevauchant, sûrs d’eux-même, au milieu des mystères,
Et ces Gestes de Dieu par les Trois Mousquetaires !

Car dans ces beaux récits à perdre haleine, il a
Ressuscité la geste ancienne, et c’est cela
Qui donne à ses héros le relief épique !
Ce compagnon que rien ne fourvoie, et qui pique
Des deux dans la légende, et qui se fait aimer
Des princesses et par les princes enfermer,
Ces preux d’un bond passant de France en Angleterre
Pour quelque talisman d’amour, et sans se taire
Devant le Cardinal, enchanteur effrayant,
Faisant leur tâche, offrant leurs têtes, et riant.
Ces braves disposant des trônes, — c’est la race
D’Amadis et d’Arthur ! Ils marchent sur la trace