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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

Pour donner une idée de ce travail immense, il suffira de dire que chacun des nombres premiers dont on veut déterminer le logarithme n’exige pas moins de 50 extractions consécutives de racines carrées et quelquefois davantage. Aussi voyons-nous dans la Logarithmotechnie de Speidell, que Briggs n’avait pas moins de huit calculateurs, qui employèrent une année entière aux extractions jugées indispensables. Pour sa table des sinus, avant d’en trouver les logarithmes, il eut besoin d’en calculer avec la même précision les nombres naturels. Ces deux ouvrages composent le monument le plus vaste qui ait longtemps existé en ce genre ; il a été la source où l’on a puisé constamment, pour nous donner les tables diverses qu’on réimprime continuellement sous diverses formes et avec plus ou moins d’étendue. Ce monument n’a été surpassé que par les grandes Tables du Cadastre, calculées sous la direction de M. de Prony ; mais ces tables n’existent encore qu’en manuscrit.

Les astronomes étaient en possession de tables qui suffisaient à tous leurs calculs, lorsque Mercator, reprenant le problème en géomètre, parvint à une formule qui aurait bien diminué le travail, si elle ne fût pas venue si tard. Cette formule, suivant une notation plus moderne, est

log (n+dn) = log n + dn/n − 1/2(dn/n)2 + 1/3(dn/n)3 − etc.,

d’où Wallis tira tout aussitôt la suivante, qui n’exigeait qu’un changement de signe,

log (ndn) = log ndn/n − 1/2(dn/n)2 − 1/3(dn/n)3 − etc.,


De ces formules générales, les géomètres qui sont venus depuis ont su tirer des formules plus convergentes, qui diminueraient encore la besogne. D’intrépides calculateurs les ont employées pour nous donner des logarithmes à 20, 48 et jusqu’à 61 décimales. Mais ces tables, heureusement, sont inutiles aux astronomes.

Dans le même ouvrage, qui contient la formule fondamentale dont toutes les autres ne sont que des corollaires, Mercator indiqua le premier une relation singulièrement curieuse entre les logarithmes et les espaces hyperboliques renfermés entre la courbe et ses asymptotes, mais cette théorie, si remarquable et si belle, est encore étrangère à l’Astronomie. L’auteur même déclare que la nature des logarithmes ne dépend nullement de la Géométrie ; il y remarque seulement une douce