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Page:Delarue-Madrus - Comme tout le monde.djvu/163

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Comme tout le monde

chercha pas à la retenir. Elle semblait, depuis un moment, avoir tout oublié, conversation, confidences, émotion, soupirs. Et ce fut d’un air distrait, à peine poli, qu’elle dit au revoir à la femme de son avoué.


Que de pensées sur la route du retour, le nez au vent froid d’avril commençant !

« La marquise n’est pas heureuse… », ressasse Isabelle.

Elle réfléchit, cherche à énumérer les torts possibles du marquis. Puis, soupçonneuse, sans indulgence : « Ce doit être de sa faute à elle, bougonne-t-elle entre ses dents ; c’est une si drôle de femme ! »

Oui, malgré les belles paroles, la cordialité, la beauté, la noblesse, Isabelle reste vaguement scandalisée des propos de Margit Szentendrey, de ses allures étranges. Puis elle se sent tellement humiliée de n’être qu’un si petit être à côté de cette femme tragique, vouée, à n’en pas douter, aux grandes aventures où la chair et l’âme se déchaînent audacieusement, furieusement… Elle, Isabelle, ne serait jamais tragique. Elle ne serait amante que de cœur, tout bêtement, tout quotidien-