Cependant, une autre révélation lui était réservée.
Un jour, occupée dans sa chambre, elle entend tout à coup un tapage extraordinaire dans la salle à manger. Les éclats de rire de Zozo se mêlent à ceux du petit Louis, dominés par la voix de l’aîné, cette voix qu’on n’entend jamais.
Isabelle se précipite. Et, sitôt qu’elle paraît, le petit Louis et Zozo s’esclaffent ensemble :
— Maman !… Léon qui fait des vers !
Le petit Louis brandit un papier qu’en vain Léon, l’aîné, cherche à lui arracher.
— Écoute, maman !… s’exclame le petit Louis.
Il récite en criant :
Jeanne d’Arc qu’on brûla jadis, ô gloire amère,
En rêve je la vois belle comme ma mère !
Une gifle a retenti. Le petit Louis, assommé, abasourdi, se tient un instant la joue, puis éclate en cris et en pleurs. Léon, l’aîné, a repris enfin son papier. Il s’apprête à frapper encore. Blême de rage, terriblement pareil à son père, il lève le poing. Isabelle s’est jetée sur lui, frémissante d’indignation.
Elle n’ose gifler à son tour ce fils trop grand qui vient de frapper son préféré ; mais ses yeux roux se sont remplis d’une telle haine que l’aîné, soudain calmé, baisse la tête.