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Comme tout le monde

son front. Elle a la fraîcheur lisse et rose des enfants. Elle est charmante.

« Allons, pense-t-elle, je n’ai pas de chance ! Voilà que j’ai le sang à la tête et que le vent m’a toute décoiffée. »

Elle donne un petit coup de tête à son chapeau pour le remettre en place, ouvre la bouche afin que son menton tire sa voilette, et enfin, lâchant un instant sa jupe, se décide à sonner.

Maintenant, le concierge l’ayant laissée passer, elle s’avance le long d’une allée de sable, entre des fusains mouillés, des arbustes rares emmaillotés de paille. Des pelouses grandes comme des prairies bordent l’allée qui monte, tourne et retourne avant d’aboutir au château, lequel, tout enveloppé de vieux arbres, est ancien d’un côté, neuf de l’autre, ayant été récemment restauré.

Devant les marches du perron, Isabelle voit un petit garçon aux yeux boudeurs et tristes, qui joue sans entrain à faire manœuvrer une automobile de poupées, magnifique jouet, sur l’une des larges marches. Ses deux gouvernantes, vêtues de noir, debout à quelques pas, surveillent ses gestes. Le petit marquis jette sur Isabelle un regard mauvais, et recule. Emmitouflé, maigrelet, pâlot, ce fameux Anne-Louis-Élémir n’a vraiment rien de merveilleux.