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Page:Delarue-Mardrus - Horizons, 1904.djvu/105

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La ville folle veut qu’on la viole et cerne,
Elle se plaît au bruit des grincements de dents.
Anarchie ! Anarchie !… — Une poussée interne
Nous gonfle ; et, sans parler, nous rions en dedans.

Rire de l’ironie intime, rire immense :
Les Révolutions ?… C’est nous qui les ferons !
Elles vont se heurter où tout meurt et commence,
Dans notre esprit, parmi la ville de nos fronts.

Elles triompheront à jamais dans nos songes.
Nous, nous rêvons ; vous, vous vivez. Double chemin.
La vie est pauvre ; son butin n’est qu’un mensonge.
Le rêve seul est riche et tient tout dans ses mains.

Le rêve est seul vainqueur de toutes les batailles.
Il est le Contre, il est le Pour, le Tout-Puissant.
Pour vous, vous lutterez les pieds dans vos entrailles,
Jusqu’au jour revenu de cuver tout le sang ;

Jusqu’au jour où l’on tombe écartelé dans l’herbe
Avec la ville et le couchant autour de soi,
Ivre-mort d’un étrange vin, les bras en croix,
Recommençant le geste et nous laissant le Verbe.