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la mère et le fils

« M’y revoici sous cette pluie noire. Le grand cheval de plâtre, presque démoli, s’égoutte sur mon dos déjà trempé. Je n’ai jamais su le nom des arbustes qui ont envahi. En été, ils auront des petites boules blanches et molles.

« Allons ! Voilà le soleil qui crève tout, malgré la pluie. La maison va se réveiller… Oh ! ça sent si bon aussi, tout ce printemps englouti sous l’eau ! Tant pis ! Je n’aurai pas le temps d’aller revoir le reste. Et puis, je le connais par cœur.

« Heureusement que j’avais mes frusques de nuit (mes savates sont certainement fichues). Une fois changé de pied en cap, je cesserai sans doute de claquer des dents. »

Il n’avait rien, trois quarts d’heure plus tard, en route vers la gare sous un vieux parapluie, rien que vingt-cinq francs dans sa poche, gardés depuis sa fête, cadeau annuel de ses oncles, et, dans sa poche également, avec la carte de sa mère, cette lettre escamotée l’avant-veille dans le courrier, cette petite lettre bleutée sur laquelle courait, banale, une grande écriture de femme.