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gradines, aux mains du sculpteur et du praticien, aplanir et faire se rejoindre les trous pratiqués dans le marbre.

Alors un mot lumineux chanta, plus beau que toutes les musiques : Désintoxication.

— Ça y est ! Elle renaît ! Son génie revient ! Je l’ai sauvée !… Je savais bien qu’elle finirait par retrouver sa saine nature, au plein air et dans la sobriété ! Il n’a pas fallu plus d’un mois. Je n’en espérais pas autant !

Le soir, dans la maison, il lui baisait les mains avec des rires de triomphe. Kriegel ayant dû repartir pour un travail pressant à Paris, resté seul devant son bloc, tout en frappant et cisaillant pour approcher la forme, il reprit leurs chères conversations, dialogues bouffons et tendre que ne pouvait plus gêner le sourire amusé du témoin.

La belle existence qu’ils allaient mener maintenant ! Chacun avec ses moyens, côte à côte, ils allaient créer de la beauté. La noblesse de l’art allait les tirer de la vie toute bestiale imposée à eux par le silence qui séparait leurs races. Un jour, quand l’heure serait venue des grammaires et des méthodes, délivrance à portée de la main, ils se rejoindraient dans la clarté longtemps cachée, et leur amour de grands cultivés s’accomplirait tout entier.

— Je sens que je vais t’aimer encore plus !… chuchotait l’amant, la bouche perdue dans la brousse en flamme des cheveux fous.

Boy !… le grondait-elle, don’t you know I cannot understand french ?… (Petit garçon, ne savez-vous pas que je ne puis comprendre le français ?…)

Un nouvel orage dérangea l’été. Jude choisissait parmi les ciseaux lorsque cela se déchaîna. Les menaces noires accumulées au-dessus de sa tête n’étaient pas pour l’interrompre dans son travail. Mais, sortie depuis une demi-heure avec le chien, Mrs Backeray, peut-être, était encore loin de la mai-