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rédalga

Les cheveux de Rédalga, pareils à la saison, rutilaient de la même façon que les bois couleurs d’incendie.

Cette torche vivante se promenait parmi les ors multiples de la nature en décomposition. Parfois, une idée passait. Rédalga revenait vers son amant toujours penché sur son marbre, pour lui montrer le collier rouge de grains de sorbier ou la couronne de grappes noires de sureau dont elle s’était ornée.

Il voyait venir à lui, du fond de l’automne flammée, cette bacchante silencieuse dont la chevelure coiffée de luisantes baies copiait tous les tons des feuillages défunts.

— Oh ! que tu es belle ! s’écriait-il, enthousiasmé par la poésie de cette apparition.

Elle repartait heureuse. Et, de loin, il la suivait longtemps des yeux.

Les mauvais rêves étaient passés.

Il n’y avait plus d’heures dangereuses au cours des journées. Calmée et douce, elle vivait à côté de lui, tendrement, sans jamais le gêner dans son travail, ne demandant rien, ne semblant désirer que ce qu’il lui donnait.

Ses nervosités morbides complètement disparues la laissaient plus belle et comme rajeunie.

Levés moins tard que les premiers temps de leur séjour, ils descendaient dans le parc vers dix heures. Jude empoignait sa gouge, sa rondelle ou sa râpe et reprenait le modèle de sa fontaine ; enfin sortie des limbes. C’était le moment, pour Rédalga, des grands jeux avec le chien. À travers le parc, tout en entraînant la lourde bête grise, elle allait à la découverte de l’automne.

Lente et tragique Fête-Dieu, l’universelle effeuillaison est plus riche en surprises que même le printemps. La Mary Backeray du passé, enfance initiée aux secrets de la campagne, le savait mieux que personne. Elle cherchait parmi les jonchées du sous-bois et trouvait la petite feuille rouie dont les