Page:Delarue-Mardrus - Rédalga, 1931.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
18
rédalga

der de bas en haut l’allégorie. Bienfait d’une petite louange qui tombe juste à temps sur le découragement de l’artiste !

— Tu trouves ?… C’est curieux ! Moi, depuis tantôt, je me dis que c’est du mauvais travail.

— Tues fou ! Je te surprends, au contraire, en plein génie. Quelle envolée, mon cher !… Et regarde comme tu as bien fait ta palette de lumière et d’ombre !… C’est admirable !

Alvaro parle sur un ton monocordes, sans aucun éclat, et qui donne plus de prix à ses paroles quand il s’exalte, ce qui n’est pas fréquent.

Il reprend, après contemplation :

— Et voilà ces belles choses que : j’aime depuis longtemps. Ta Vierge du Nord… et-ta Grande Initiée… Ah ! celle-là ! Si j’étais Français… Mais j’espère toujours la faire prendre par le musée de Lisbonne. Tu viendras voir le Portugal !… Ah ! voilà le plâtre du buste de Raul da Silva. Il en est si fier de son buste, si tu savais ! Il te rendra célèbre au Portugal. Et Olga, donc ! Elle ne parle que de toi, depuis qu’elle est retournée là-bas. Quant au mien, tu sais s’il a des admirateurs.

— C’est grâce à toi, tout ça, grand ami…

— Qu’est-ce que c’est que ça, à côté de ce que je voudrais pour toi ! Si seulement j’étais riche…

Être riche, pour le comte Alvaro, qu’est-ce que c’est ? Sa vie, distribuée entre Paris, Lisbonne et d’immenses voyages, a l’air d’être celle d’un millionnaire.

— Allons ! Je rêve, et le temps passe. Vite, Jude, défais ta blouse, et viens. Nos amis nous attendaient à huit heures. Il en est neuf. Ça ne fait rien, du reste !

— Mais je ne suis même pas rasé ! dit Jude en se dépêchant, et j’ai mon vieux veston de travail.

— Eh bien ! Je te jette chez toi et je t’attends dans la voiture. Je l’ai laissée au coin de la rue, On ne s’habille pas.