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rédalga

qu’il n’y avait rien derrière cette porte, rien que la rue vide où, dans un instant, il s’en irait, malgré tout, mener ses pas sans but.

— Vous ?… s’écria-t-il avec une intonation où passa de la colère.

Et Mrs Backeray fit une entrée assez étonnante.

Elle portait un petit tailleur propret, un feutre neuf, ses joues étaient poudrées et fardées, ses yeux légèrement allongés au kohl, sa bouche crayonnée de rouge. Normale, le regard direct, elle tendit la main.

You must excuse me, dit-elle, about the other day. I was se sick ! I really did not know exactly what I was doing.

Elle parlait vite, avec un demi-sourire. Voyant qu’il n’avait rien compris :

— Excuse-moi, vous… venioue vous dire… Pas bien, autre jour…

Impatientée de ne pouvoir s’exprimer, elle soupira nerveusement.

Harlingues, de tous ses yeux trop clairs, la regardait. Il ne la reconnaissait pas. Il la trouvait belle. Cette transformation gênait le sentiment confus qu’il avait en la revoyant devant lui. C’était une espèce de complicité venue de ce que, chevaleresque, il avait menti pour elle. Courtois, il avança la chaise.

Elle ne s’assit pas, mais elle ôta son chapeau. Ses cheveux, tempête de cuivre, flamboyèrent. Ainsi poudrée et fardée, elle était nette et comme repassée. Et les couleurs de son visage, aidées par l’arrangement, réapparaissaient pour expliquer son type.

Il remarqua le bleu foncé de ses yeux battus, la courbe particulière de sa bouche fatiguée, l’intellectualité de ses tempes, le coup de soleil de sa chevelure. Le peigne et la brosse avaient fait leur travail là-dedans.