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rédalga

créer entre eux. Puisque les paroles manquaient, il fallait respirer cela comme un parfum, s’en griser en silence comme d’une musique.

Joyeusement, il retira les chiffons mouillés enveloppant le buste, avança, recula, regarda le modèle, choisit parmi ses outils bousculés, coupa dans une motte neuve, avec son fil de fer.

Mais, avant de commencer, au courant déjà :

— Voilà des cigarettes… dit-il en lui mettant le paquet sur les genoux.

Cela dura jusqu’à quatre heures, sans bruit, avec de courts repos où, elle venait regarder ce qu’il avait fait, et quelques paroles échangées dans leur sabir.

À partir de quatre heures, il remarqua qu’elle s’agitait.

— Vous fatiguée ?… You tired ? … finit-il par questionner.

No ! … Mais moâ veux avoir mon… thé,

— Oh ! c’est vrai !… s’excusa-t-il.

Et, tout embarrassé :

— Comment faire ? Je n’ai rien, ici !

Sans le comprendre, elle se leva, remit son chapeau,

— Vous vous en allez ?

— Vous… vienne… avec moâ !

— Bien… dit-il en hésitant.

Il se décida, lava ses mains, défit sa blouse, passa sa veste, prit son chapeau.

Tous deux les voilà dans la rue.

— Un thé dans ce quartier-ci ?… rêvait-il, tout confus.

Au coin de la rue, il y avait le marchand de vins chez lequel il déjeunait tous les jours.