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rédalga

— Tu la connais ! cherche bien !

— Mais cher… Non !… Ce n’est pas ?… Est-ce que ce serait l’Anglaise de Rodrigo ?

Harlingues eut un mouvement. Ce n’était pas l’Anglaise de Rodrigo. C’était son Anglaise à lui.

— C’est Mrs Backeray, oui.

— Oh ! que c’est drôle !… : s’écriait Alvaro. Tu t’en es inspiré pour faire cette belle chose… Ça, c’est trop fort !

— Je ne m’en suis pas inspiré, non. Elle a posé.

La main sur la bouche, Alvaro se mit à rire aux éclats.

— Tu l’as revue ? Tu la fais poser ?… Tu lui as coupé les cheveux !… Raconte ! C’est trop amusant !

Son rire cessa net. Il venait de voir l’expression d’Harlingues.

— Elle n’est pas ce que nous pensions… Commença celui-ci. Rodrigo te racontera ce qu’il a découvert à Londres. Il m’a écrit… C’est un grand poète, cette femme-là, continua-t-il, et son histoire, tu sais, est tout à fait palpitante… D’abord, si tu la revoyais, tu serais bien étonné. Ce n’est plus du tout celle que nous avons vue au bar. Elle est maintenant arrangée, bien tenue… Et puis, je t’assure, une dame ; une vraie dame de race !

Sa voix tremblait légèrement, ses yeux brillaient.

— Mais, cher, dit Alvaro riant encore, je t’assure que tu m’inquiètes. On dirait, maintenant, que c’est toi qui es amoureux d’elle.

Il se mordit les lèvres. Harlingues venait de pâlir un peu.

— Jude !… Voyons !… Ce n’est pas possible ! Tu… Tu l’aimes ?…

Et Jude murmura :

— Je crois que oui.