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qu’on n’en avait pas suffisamment compris la portée, et les philosophes étaient plutôt tentés d’établir des hypothèses et de fonder eux-mêmes des systèmes que d’étudier ceux qui avaient été imaginés avant eux. Les matériaux nécessaires pour cette histoire étaient donc restés trop disséminés, et, pour les recueillir, les coordonner, pour composer une histoire complète des écoles dans les différentes branches de la philosophie, il eût fallu la vie d’un homme. Aussi Adam Smith fut obligé de bonne heure de sacrifier cette partie de son plan pour s’adonner plus exclusivement à ses recherches soit sur la morale, soit sur la formation de la richesse, et ses premiers Essais sur l’histoire des systèmes restèrent, comme son Traité du Droit, à l’état de fragments généralement fort incomplets : une partie seulement de ces études trouva sa place, à la suite de la Théorie des Sentiments moraux, dans son rapide aperçu des doctrines de philosophie morale.

Toutefois, au moment de sa mort, Smith fut plus indulgent pour ces premières tentatives de sa jeunesse que pour ses autres œuvres. Il ne fit détruire, d’ailleurs, que ceux de ses manuscrits qu’il trouvait inférieurs aux travaux existants sur la matière : c’est ainsi qu’il anéantit son Traité sur la Rhétorique parce qu’il aurait eu besoin de le remanier totalement pour l’élever à la hauteur de l’œuvre savante d’Hugh Blair, et aussi son Traité du Droit, parce qu’il ne le jugeait pas digne d’être rapproché de l’Esprit des Lois. Mais, en ce qui concerne ses Essais philosophiques, il était le seul auteur qui eût tenté jusqu’alors d’écrire l’histoire des systèmes ; il n’avait donc pas le même motif pour les détruire, et il jugeait au contraire que, par la manière dont il avait compris son sujet, ces travaux pourraient être de quelque utilité aux philosophes futurs qui continueraient ses recherches.

L’Histoire de l’Astronomie est assurément la plus intéressante de ces études, et, bien que Smith n’ait pas tardé à reconnaître comme il le dit lui-même[1], « qu’il y a dans quelques parties de cet écrit plus d’art que de solidité », elle mérite d’être analysée. Ici, toutes les idées sont personnelles à l’auteur ; son esprit

  1. Voir Ire Partie, p. 68.