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Le travail libre, tel est donc le facteur nécessaire de la production. Il s’exerce d’abord exclusivement sur les agents naturels, et en particulier sur la terre ; puis son produit arrive à excéder le fonds nécessaire à la subsistance, il s’accumule et se crée ainsi un nouvel auxiliaire pour la production. Cet auxiliaire n’est autre chose que du travail accumulé ; c’est ce qu’on a nommé le capital.

Smith n’a pas voulu voir dans le capital un second facteur de la production. Pour lui, il n’y en a qu’un seul, le travail, qui est, selon son expression, le fonds primitif qui fournit à la consommation d’une nation toutes les choses nécessaires et commodes à la vie ; les agents naturels en sont la condition nécessaire, et le capital, issu du travail lui-même, en est l’instrument fécond. En d’autres termes, la production consiste dans le rapprochement de deux substances, en vue d’obtenir un certain résultat : le véritable et seul facteur est donc le moteur, c’est-à-dire la force active qui est en nous et qui se manifeste dans la production par le jeu de nos muscles. Le capital est de la richesse déjà créée ; c’est la portion de cette richesse qui sert à la reproduction ; c’est, comme on l’a dit fort justement, la graine de la veille qui devient semence le lendemain, et le travail trouve dans cette richesse qu’il a produite lui-même, un levier puissant pour continuer son œuvre.


Le livre II des Recherches est consacré aux capitaux : c’est là l’une des études les plus lumineuses de tout l’ouvrage.

Smith expose fort nettement les causes nécessaires de l’accumulation du capital. Il montre, comment l’homme, à l’état sauvage, pouvait vivre au jour le jour, sans capital accumulé, vivant des produits mêmes de son travail, avec le seul concours des agents naturels. Mais lorsque les besoins s’accrurent, lors que l’homme, pour développer la puissance de son effort, en arriva à la séparation des tâches, et lorsqu’il dut pourvoir à la plus grande partie de ses besoins au moyen des produits du travail d’autrui achetés avec les produits de son propre travail, alors, ne pouvant attendre pour subsister qu’il eût achevé ses produits et qu’il les eût échangés, il lui fallut l’appui d’un capital