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l’effet naturel des lois économiques, c’est la prospérité de la culture qui aurait dû provoquer le développement des manufactures et du commerce.

Cette partie des Recherches est fort intéressante et témoigne d’un véritable esprit philosophique comme de grandes connaissances techniques. L’auteur attribue la perturbation qu’il signale à trois sortes de causes 1° à la constitution des grands domaines formés lors de l’invasion des barbares et maintenus par les lois de primogéniture et les substitutions ; 2° aux modes de tenure des terres ; 3° à l’action des gouvernements qui ont cherché à favoriser l’industrie, au moyen de tout un ensemble de réglementations qu’il a condamnées sous le nom de système mercantile.

Il n’est pas partisan des trop grands domaines, et s’il admet que des considérations puissantes aient pu militer, au point de vue politique, en faveur de cette concentration des terres, à un moment où la propriété était exposée de toute part aux ravages et aux incursions des voisins, il déplore vivement, au point de vue économique, la prolongation de cet état de choses après la disparition des circonstances qui l’avaient fait naître. Il considère en effet que le grand propriétaire se montre généralement peu disposé aux améliorations, tandis que le petit cultivateur, au contraire, est, de tous ceux qui font valoir, celui qui apporte le plus d’intelligence dans son exploitation et qui obtient les meilleurs résultats, car il connaît tous les recoins de son petit territoire, il les surveille avec cette attention soigneuse qu’inspire la petite propriété, il se plaît à cultiver sa terre, et même à l’embellir.

Ce n’est pas à dire, cependant, qu’il condamne absolument les grands domaines, quels qu’ils soient. Assurément la grande propriété n’est pas un mal en elle-même lorsqu’elle est le résultat de la liberté des transactions, parce que l’effet de la liberté est toujours, à la longue, de faire passer les terres des mains des inhabiles ou des négligents dans les mains des plus capables ; mais il n’en était pas ainsi sous le régime des substitutions et des lois de primogéniture qui empêchaient l’aliénation et le morcellement des héritages.