des armes d’une correspondance privée et qu’il était maladroit de reprocher des bienfaits.
À l’exception de la lettre que nous venons de citer, nous ne possédons, de la main d’Adam Smith, aucun document qui puisse nous renseigner sur son séjour à Paris.
Nous n’avons, notamment, aucune donnée sur ses rapports avec les Économistes. Nous eussions aimé cependant à connaître la nature et le caractère de ses relations avec Quesnay, et surtout ses premières impressions sur les théories des physiocrates. Assurément nous trouvons, dans les Recherches mêmes, une étude sommaire de cette doctrine « qui, avec toutes ses imperfections, dit Smith[1], est peut-être, de tout ce qu’on a publié sur l’économie politique, ce qui se rapproche le plus de la vérité » ; mais cette étude, mûrie par une solitude de dix années, ne reproduit certainement pas d’une manière exacte le jugement que le philosophe a dû porter sur ce système à son arrivée à Paris, lorsque ses idées étaient sans doute peu fixées sur les divers points de la science nouvelle.
Nous sommes un peu mieux renseignés sur ses relations avec Turgot, qui, en philosophie, lui doit certainement beaucoup. Le futur ministre de Louis XVI était alors intendant du Limousin, mais il venait fréquemment à Paris et avait grand plaisir à converser avec Adam Smith dont il estimait beaucoup le talent[2]. Ces deux grands esprits se ressemblaient d’ailleurs sous plus d’un rapport : même puissance d’observation, même goût pour les recherches philosophiques qu’ils poursuivaient dans toutes les branches des sciences morales et politiques, même amour pour l’humanité, et on pouvait appliquer à l’un comme à l’autre ce vers de Voltaire que M. Baudrillart a placé au frontispice de son admirable Éloge de Turgot[3] :
- Il ne cherche le vrai que pour faire le bien.
Leur conversation roulait sur toutes les sciences qui leur étaient familières, et si Smith put tirer parti des recherches économiques et de l’expérience administrative de son interlocu-