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Permettez-moi de vous demander si nous aurons bientôt une édition complète des Œuvres de votre illustre ami M. Hume ? Nous l’avons sincèrement regretté.

Recevez, je vous supplie, l’expression sincère de tous les sentiments d’estime et d’attachement avec lesquels j’ai l’honneur d’être, Monsieur, votre très-humble et très-obéissant serviteur.

Duc de la Rochefoucauld.


Ajoutons que Smith fut touché par les sentiments de piété filiale qui étaient exprimés dans cette lettre. Il fit prévenir le jeune duc que, dans les futures éditions de sa Théorie, le nom de La Rochefoucauld ne se trouverait plus associé à celui du Dr Mandeville, l’auteur de la Fable des abeilles, et il relut avec attention l’ouvrage qu’on lui adressait, dans l’espoir de trouver la doctrine moins mauvaise qu’il ne l’avait jugé précédemment. Mais il ne put trouver à approuver quoi que ce soit, en dehors de la forme, dans l’œuvre du célèbre frondeur, et il préféra faire disparaître purement et simplement, dans la dernière édition de son traité, tout ce qui se rapportait à ce système qu’il avait toujours qualifié jusque-là de licencieux et de dégénéré.


Adam Smith ne s’occupa pas seulement de philosophie et d’économie politique pendant son voyage en France : il ne négligea aucune partie de son vaste plan, et, de même qu’il avait cherché à Toulouse, dans la société des magistrats, des documents pour son Traité du Droit, il profita de son séjour à Paris pour compléter ses recherches sur les arts imitatifs dans l’histoire desquels il comptait trouver des renseignements précieux sur la marche de l’esprit humain. « Il n’avait jamais négligé, dit Dugald-Stewart, de cultiver son goût pour les arts libéraux, moins sans doute pour jouir des plaisirs qu’ils procurent, quelque sensible qu’il y pût être, qu’à cause de leur liaison avec les principes généraux de l’esprit humain, dont l’étude semble s’ouvrir par cette voie sous sa forme la plus riante. Ceux qui s’occupent de ce sujet délicat trouvent dans la comparaison des goûts divers des différents peuples, un recueil de faits précieux, et M. Smith, toujours disposé à attribuer à la mode et à la coutume toute leur influence sur les opinions relatives à la beauté, devait,