Page:Delavigne - Œuvres complètes, volume 4, Didot, 1881.djvu/17

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La timide amitié n’a plus d’épanchemens ;
On s’évite, on se craint ; la foi n’a plus d’asile,
Et s’enfuit d’épouvante au bruit de nos sermens.

O vertige fatal ! Déplorables querelles
Qui livrent nos foyers au fer de l’étranger !
Le glaive étincelant dans nos mains infidèles,
Ensanglante le sein qu’il devrait protéger.

L’ennemi cependant renverse les murailles
De nos forts et de nos cités ;
La foudre tonne encore, au mépris des traités.
L’incendie et les funérailles
Épouvantent encor nos hameaux dévastés ;
D’avides proconsuls dévorent nos provinces ;
Et, sous l’écharpe blanche, ou sous les trois couleurs,
Les français, disputant pour le choix de leurs princes,
Détrônent des drapeaux et proscrivent des fleurs.

Des soldats de la Germanie
J’ai vu les coursiers vagabonds
Dans nos jardins pompeux errer sur les gazons,
Parmi ces demi-dieux qu’enfanta le génie.
J’ai vu des bataillons, des tentes et des chars,
Et l’appareil d’un camp dans le temple des arts.
Faut-il, muets témoins, dévorer tant d’outrages ?
Faut-il que le français, l’olivier dans la main,
Reste insensible et froid comme ces dieux d’airain
Dont ils insultent les images ?

Nous devons tous nos maux à ces divisions
Que nourrit notre intolérance.
Il est temps d’immoler au bonheur de la France
Cet orgueil ombrageux de nos opinions.
Etouffons le flambeau des guerres intestines.
Soldats, le ciel prononce, il relève les lis :