Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/115

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Détache un grain de neige. à ce léger fardeau
Des grains dont il s’accroît se joint le poids nouveau ;
La neige autour de lui rapidement s’amasse ;
De moment en moment il augmente sa masse :
L’air en tremble, et soudain, s’écroulant à la fois,
Des hivers entassés l’épouvantable poids
Bondit de roc en roc, roule de cime en cime,
Et de sa chute immense ébranle au loin l’abyme.
Les hameaux sont détruits, et les bois emportés ;
On cherche en vain la place où furent les cités,
Et sous le vent lointain de ces Alpes qui tombent,
Avant d’être frappés, les voyageurs succombent.
Ainsi quand des excès, suivis d’excès nouveaux,
D’un état par degrés ont préparé les maux,
De malheur en malheur sa chute se consomme ;
Tyr n’est plus, Thèbes meurt, et les yeux cherchent Rome !
O France, ô ma patrie ! ô séjour de douleurs !
Mes yeux à ces pensers se sont mouillés de pleurs.
Vos pas sont-ils lassés de ces sites sauvages ?
Eh bien ! Redescendez dans ces frais paysages.
Là le long des vallons, au bord des clairs ruisseaux,
De fertiles vergers, d’aimables arbrisseaux,
Et des arbres pompeux et des fleurs odorantes,
Viennent vous étaler leurs races différentes.
Quel nouvel intérêt ils donnent à vos champs !
Observez leurs couleurs, leurs formes, leurs penchans,