Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/76

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Que la cendre tantôt, tantôt les vils débris
Des grains dont sous leurs toits vos pigeons sont nourris,
Tantôt de vos troupeaux la litière féconde,
Changent en sucs heureux un aliment immonde.
Ici, pour réparer la maigreur de vos champs,
Mêlez la grasse argile à leurs sables tranchans :
Ailleurs, pour diviser les terres limoneuses,
Mariez à leur sol les terres sablonneuses.
Vous, dont le fol espoir, couvant un vain trésor,
D’un stérile travail croit voir sortir de l’or,
D’un chimérique bien laissez là l’imposture :
L’or naît dans les sillons qu’enrichit la culture ;
La terre est le creuset qui mûrit vos travaux,
Et le soleil lui-même échauffe vos fourneaux.
Les voilà, les vrais biens, et la vraie alchimie.
Jadis, heureux vainqueur d’une terre ennemie,
Un vieillard avoit su de ses champs plus féconds
Vaincre l’ingratitude et doubler les moissons.
Il avoit, devinant l’art heureux d’Angleterre,
Pétri, décomposé, recomposé la terre,
Créé des prés nouveaux ; et les riches sainfoins,
Et l’herbe à triple feuille, avoient payé ses soins.
Ici des jeunes fleurs il doubloit la couronne,
Là de fruits inconnus enrichissoit l’automne.
Nul repos pour ses champs, et la variété,
Seule, les délassoit de leur fécondité.