Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/87

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Guidez dans des canaux leur onde apprivoisée.
Que, tantôt réunie et tantôt divisée,
Elle tourne la roue, élève les marteaux,
Et dévide la soie, ou dompte les métaux.
Là, docile ouvrier, le fier torrent façonne
Les toisons de Palès, les sabres de Bellone :
Là, plus prompt que l’éclair, le flot lance les mâts
Destinés à voguer vers de lointains climats :
Là pour l’art des Didot Annonay voit paroître
Les feuilles où ces vers seront tracés peut-être.
Tout vit, j’entends partout retentir les échos
Du bruit des ateliers, des forges et des flots.
Les rocs sont subjugués ; l’homme est grand, l’art sublime :
La montagne s’égaie, et le désert s’anime.
Sachez aussi comment des fleuves, des ruisseaux
On peut mettre à profit les salutaires eaux ;
Et Pomone et Palès, et Flore et les Dryades,
Doivent leurs doux trésors à l’urne des Nayades,
Surtout dans les climats où l’ardente saison
Jusque dans sa racine attaque le gazon,
Et laisse à peine au sein de la terre embrasée
Tomber d’un ciel avare une foible rosée.
Non loin est un ruisseau ; mais de ce mont jaloux
Le rempart ennemi le sépare de vous :
Eh bien ! Osez tenter une grande conquête.
Venez, de vos sapeurs déjà l’armée est prête.