Page:Delille - Les Jardins, 1782.djvu/28

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Mais les jardins bornés m’importunent encor.
Loin de ce cercle étroit prenons enfin l’essor
Vers un genre plus vaste et des formes plus belles,
Dont seul Ermenonville offre encor des modèles.
Les jardins appeloient les champs dans leur séjour,
Les jardins dans les champs vont entrer à leur tour.

Du haut de ces coteaux, de ces monts d’où la vue
D’un vaste paysage embrasse l’étendue,
La nature au génie a dit : « Écoute-moi.
Tu vois tous ces trésors ; ces trésors sont à toi.
Dans leur pompe sauvage et leur brute richesse,
Mes travaux imparfaits implorent ton adresse ».
Elle dit. Il s’élance, il va de tous côtés
Fouiller dans cette masse où dorment cent beautés.
Des vallons aux coteaux, des bois à la prairie,
Il retouche en passant le tableau qui varie.
Il sait, au gré des yeux, réunir, détacher,
Éclairer, rembrunir, découvrir ou cacher.
Il ne compose pas ; il corrige, il épure,
Il achève les traits qu’ébaucha la nature.
Le front des noirs rochers a perdu sa terreur ;
La forêt égayée adoucit son horreur ;