Page:Delille - Les Jardins, 1782.djvu/61

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De vingt climats divers en un seul lieu rassemble
Ces peuples végétaux surpris de croître ensemble,
Qui, changeant à la fois de saison et de lieu,
Viennent tous à l’envi rendre hommage à Jussieu,
L’indien parcouroit leurs tribus réunies,
Quand tout-à-coup, parmi ces vertes colonies,
Un arbre qu’il connut dès ses plus jeunes ans
Frappe ses yeux. Soudain, avec des cris perçants
Il s’élance, il l’embrasse, il le baigne de larmes,
Le couvre de baisers. Mille objets pleins de charmes,
Ces beaux champs, ce beau ciel qui le virent heureux,
Le fleuve qu’il fendoit de ses bras vigoureux,
La forêt dont ses traits perçoient l’hôte sauvage,
Ces bananiers chargés et de fruits et d’ombrage
Et le toit paternel, et les bois d’alentour,
Ces bois qui répondoient à ses doux chants d’amour,
Il croit les voir encore, et son âme attendrie,
Du moins pour un instant, retrouva sa patrie.