Page:Delille - Les Jardins, 1782.djvu/66

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Je prépare pour vous le murmure des eaux,
Les tapis des gazons, les abris des berceaux,
Où mollement assis, oubliant les alarmes,
Tranquilles vous direz la gloire de nos armes,
Tandis qu’entre la crainte et l’espoir suspendus,
Vos enfants frémiront d’un danger qui n’est plus.

Achevons cependant d’orner ces frais asiles.
Jadis dans nos jardins les fables infertiles,
Tristes, secs, et du jour réfléchissant les feux,
Importunoient les pieds et fatiguoient les yeux.
Tout étoit nu, brûlant ; mais enfin l’Angleterre
Nous apprit l’art d’orner et d’habiller la terre.
Soignez donc ces gazons déployés sur son sein.
Sans cesse l’arrosoir ou la faux à la main,
Désaltérez leur soif, tondez leur chevelure.
Que le roulant cylindre en foule la verdure.
Que toujours bien choisis, bien unis, bien serrés,
De l’herbe usurpatrice avec soin délivrés,
Du plus tendre duvet ils gardent la finesse ;
Et quelquefois enfin réparez leur vieillesse.
Réservez toutefois aux lieux moins éloignés
Ce luxe de verdure et ces gazons soignés.