Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/75

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donné pour excuse le soin qu’elle devait prendre d’installer son fils dans la maison amie, où il doit vivre quelques mois. Elle s’est dérobée, sans adresse, je dois le dire, car elle insistait par trop sur ce prétexte de son fils, et de la vie de son fils, et des études de son fils. Pas littéraire ni sentimental, ce dialogue, où la réplique est toujours « mon fils » et encore « mon fils ».

Cette femme, jeune, souriante, plaisante, émouvante, va-t-elle se perdre et se gâcher dans une tendresse si bizarre ? On ne peut pas ne pas vivre sous prétexte qu’on est mère. Surtout une Française.

Je lui ai dit :

— Mais j’ai un fils, Madame, j’ai un fils, moi aussi.

Sa réponse m’a prouvé que le prétexte n’était pas un prétexte imaginé. Elle a répondu sur un ton indéfinissable :

— Ce n’est pas la même chose.

D’ailleurs, je n’ai pas compris. Était-ce de l’ironie ? D’elle, cela ne me surprendrait pas. Mais je ne crois pas qu’elle ait pensé avec ironie.

Ce n’est pas la même chose. Certes, ce n’est pas la même chose. J’ai un fils, j’ai plusieurs fils qui sont de beaux officiers, beaux à voir, beaux dans leurs actes et leur fierté, tous dignes d’une haute famille, tous admirables. L’un d’eux, l’aîné,