Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chère demoiselle, mais elle a refusé en disant : « Reste près de ma pauvre maman qui va être si malheureuse sous la tyrannie de Georgina. Promet-moi de faire ton possible pour ne pas la quitter »… J’ai promis, car je suis si attachée à cette maison, à la pauvre Madame, à M. Even !… et j’avais deviné tant de choses tristes, mademoiselle Alix ! J’avais toujours l’espoir d’arrêter Mme Georgina dans son œuvre mauvaise, mais, hélas ! je ne pouvais pas grand-chose !… Qui aurait cru les racontars d’une pauvre paysanne ? Je n’avais pas de preuves à l’appui de mes dires, car elle est si habile !… Il fallait donc me taire si je voulais demeurer ici, car, au moindre mot dit au-dehors sur ce qui se passait à Bred’Languest, Mme Orzal m’aurait mise à la porte, tout simplement, tandis qu’elle avait intérêt à me conserver si je gardais le silence. Je l’ai fait pour eux, qui ont été de bons maîtres et que je veux servir jusqu’à la fin.

Elle soupira profondément et se baissa pour ramasser le linge qui gisait à terre. Alix, après un cordial bonsoir auquel la servante répondit d’une voix émue, rejoignit Gaétan dans la chambre de Xavier.

— Va te coucher, mon Gaétan, je vais rester un peu ici, dit tout bas la jeune fille en s’asseyant près de la fenêtre.

Mais Gaétan paraissait peu disposé à l’obéissance. Il erra quelque temps, d’un pas léger, à travers la chambre et, se rapprochant de sa sœur, lui dit tout à coup :

— As-tu vu le bracelet de Mme Orzal ?… Il est tout pareil à celui de maman…

Sans attendre une réponse qui tardait à venir, il ajouta avec une sorte d’hésitation, comme s’il émettait l’idée d’un incroyable sacrilège :

— C’est peut-être celui-là…