Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/82

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penché sur l’un de ces livres impies, dont une seule ligne blesserait peut-être grièvement son âme innocente… Elle prit sa course et atteignit le seuil de la maison.

Gaétan était là, dans l’encadrement de la porte, et, devant lui, se tenait Even de Regbrenz.

— Gaétan, que fais-tu ici ? dit-elle d’une voix essoufflée et tremblante.

L’enfant sursauta un peu et se détourna… Even dirigea vers elle des yeux stupéfaits. Toute pâlie par son angoisse d’un instant et par l’émotion de la présente minute, ses cheveux relevés à la hâte pour courir à la recherche de l’enfant, une robe d’intérieur tombant en plis amples autour d’elle, Alix paraissait très enfantine, si touchante et si gracieuse que l’oncle farouche sembla lui-même, pendant quelques instants, subir son charme exquis… Mais, tout aussitôt, les épais sourcils blonds se froncèrent, la physionomie d’Even se durcit et sa voix, pleine de colère, s’éleva dans le silence de la petite salle.

— Allez-vous donc tous envahir ma demeure ?… Ne serais-je plus libre chez moi ?… Hors d’ici, et promptement !

Au premier moment, Alix s’était trouvée saisie en apercevant son étrange et peu avenant parent. Mais ce ton insultant, ces paroles agressives lui rendirent sa présence d’esprit… Relevant fièrement la tête, elle fixa sur Even un regard résolu, légèrement méprisant.

— Je venais précisément chercher mon frère et m’apprêtais à le réprimander au sujet de cette nouvelle indiscrétion… Soyez sans crainte, monsieur, je n’ai aucune envie de vous importuner en quoi que ce soit et je veillerai toujours à ce que les enfants agissent de même… Je crois que, jusqu’ici — à part la malencontreuse rencontre dans la gale-