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ces, conduite par Hervé Dourzen, se fut éloignée, Gwen alla chercher son papier et ses couleurs d’aquarelliste, derrière une poutre du grenier où elle les cachait. Puis elle quitta la maison et, par un sentier entre des haies d’aubépine, gagna le bois qui avait donné son nom au logis des Dourzen. Un étroit chemin couvert de mousse descendait jusqu’à une petite grève que la mer couvrait en montant. Les jours de grande marée, elle baignait les pieds des vieux figuiers dont l’ombre s’étendait sur des roches d’un beau ton roux, striées de veines plus sombres, et qui prenaient, aux places éclairées par le soleil, des tons chauds que Gwen, depuis longtemps, souhaitait reproduire.

D’ailleurs les Roches Rouges étaient un des lieux qu’elle aimait particulièrement. Jamais elle n’y avait rencontré personne. Assise à l’ombre d’un figuier tordu par le vent de mer, elle avait sous les yeux la houle verte de l’océan, étincelante d’innombrables éclairs qui dansaient sur les flots caressés du soleil. Deux yachts se balançaient au large. Tous deux portaient le pavillon jaune à trois lotus blancs qui était celui du comte de Penanscoët, rajah de Pavala à Bornéo. Dix jours auparavant, il n’y avait qu’un seul de ces navires. Sans doute l’autre avait-il amené le jeune vicomte de Penanscoët.

Gwen disposait le papier sur ses genoux, choisissait parmi ses couleurs. Mais sa pensée