qu’il n’était encore que l’ouvrier de Vrinot frères. Son cœur égoïste, dévoré par l’ambition, avait parlé une seule fois pour Micheline Laurent. La jeune passementière avait été son unique amour ; son âme, desséchée par l’impiété et les haineux désirs de bien-être et de domination, avait ressenti un involontaire respect, une émotion, jamais éprouvée depuis, chaque fois qu’il avait rencontré le grave et pur regard de Micheline.
« Elle doit être mariée, songeait-il, tandis que l’auto filait le long du boulevard. Veuve peut-être, car elle était tout en noir. Elle est aussi jolie qu’autrefois, bien que d’une autre manière, autant que j’ai pu en juger si brièvement. »
Il revenait aux souvenirs de jadis, alors qu’il occupait avec Zélie ce pauvre petit logement. Quel chemin parcouru depuis lors ! Non, il ne regrettait pas d’avoir résisté au désir d’épouser alors Micheline. À ce moment, elle aurait entravé son avenir, tandis que le million apporté en dot par la jeune personne laide et inintelligente devenue sa femme l’avait puissamment aidé à acquérir la situation d’aujourd’hui. Mais il songeait maintenant que jamais il n’avait tout à fait oublié Micheline et que cette rencontre réveillait en lui un sentiment qu’il croyait bien éteint.
« Allons, je suis fou ! grommela-t-il en montant l’escalier qui conduisait à son appartement. J’ai bien autre chose à faire que de songer à ce temps passé, le temps où je m’arrangeais pour la